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Suze la Rousse.  Samedi 02 mai.

 

D’abord, un grand merci pour vos suggestions très con-structives.

A ma grande surprise, je reçois plus de commentaires quand mes chroniques ont une légère connotation érotique, que lorsque je les consacre aux merveilles pré colombiennes.

Pourtant, ceux qui me font l’amitié de les suivre, et qui appartiennent, pour la plupart, à ce que les gens de marketing qualifieraient d’un « segment générationnel », m’auraient semblé plus enclins à considérer ce sujet comme appartenant à la catégorie « nostalgies », qu’à celle qu’on aborde dès que les enfants sont couchés….

Comme quoi, même pendant les confinements, tous les espoirs sont permis.

Angoisse ; faut-il perdre sa pureté rédactionnelle et donner au peuple ce qu’il réclame ?

Ou faut-il refuser d’en rabattre sur les principes, et maintenir ces chroniques au niveau élevé d’exigence intellectuelle que je me suis efforcé de promouvoir depuis les origines, malgré les attaques répétées de certains ?  (Je ne citerai pas de noms, ils se reconnaitront)

Je n’en dors plus.

Alors je m’en sortirai par un stratagème, pour ne pas trancher ; un titre racoleur, pour attirer la pratique, une amorce caleçonnesque pour ferrer, et ensuite, on laisse filer, en slalomant, si on y arrive, entre les sujets qui fâchent.

Pour commencer, je vous dois des comptes, au sujet de Benjamin Grivois : pourquoi cette expression : « les génitoires et l’instrument connexe » ? J’ai, en effet, eu des remarques.

Vu le qualificatif « congénital » que j’avais choisi, « génitoires », étymologiquement, s’imposait. J’ignorais alors, le Larousse me l’a appris depuis, qu’il s’agissait d’un terme argotique, je le pensais d’origine médiévo-médicale.

Mais bon, l’argot, ça m’allait aussi.

Quant à l’organe viril, comment le localiser ? « Tangentiel », ou « adjacent » auraient été, par rapport aux susdites, géométriquement inattaquables et anatomiquement adaptés, mais ça sentait un peu trop sa prépa scientifique. On n’écrit pas pour les « Techniques de l’ingénieur », quand même….

« Annexe » était une autre option, mais, qualifier ainsi ce qui fait la fierté du mâle occidental, ce sur quoi il a assis sa domination (c’est une image, si vous essayez de mettre en pratique, attention, ça peut être douloureux !),  annexe, ça vous a une petite connotation péjorative.

Ne restait plus que « connexe »

Et pour nommer l’objet, quoi de mieux que le vocabulaire musical ? Comme chez les virtuoses qui parviennent à obtenir de leur violon des sonorités bouleversantes, le terme « archet » aurait convenu, mais c’était un peu trop démonstratif.

Par ailleurs, pour ce qu’il en est des virtuoses, discutable, si l’on en croit Georges Brassens : 95 fois sur 100, la femme…Je vous passe la suite.

On a donc préféré banaliser et retenir le terme  » instrument »…

Pas d’autres questions ? Alors, fin de la caleçonnerie, retour au sujet du moment.

Laissons de côté, s’il vous plait, les débats sur les cons : on aura remarqué que j’avais pris soin de n’épingler que les commentateurs, les radoteurs, et, parmi les dirigeants, une sélection des plus croquignolets, bien loin de chez nous.

Ici, la sous- estimation initiale du danger, les contradictions intra gouvernementales, les informations erratiques sur les masques et les tests, le changement de la Ministre de la Santé au milieu du gué, les retards dans les prises de décisions, les erreurs de com, tout ça avec un style présidentiel agaçant et un fond idéologique à géométrie variable, posent légitimement question.

Mais pour les masques, les placards étaient vides quand ils sont arrivés aux manettes et pour leur production, comme pour les tests, il y a bien longtemps que tout a été délocalisé en Asie. Pour leur distribution, les lourdeurs logistiques, résultant de notre système jacobin, ne sont pas nées avec le macronisme. Dommage, par contre, que nos dirigeants n’aient pas parlé franc dès le début, ils y auraient gagné en crédibilité.

Cependant, je trouve que ça tire beaucoup sur l’exécutif pendant une crise sanitaire et économique d’une ampleur et d’une gravité exceptionnelle, et qu’ils ont bien d’autres choses à faire que de devoir en permanence se justifier devant la représentation nationale.

Si le besoin de revanche des oppositions n’est pas surprenant après le cataclysme politique de 2017, certains diraient même de bonne guerre, je n’avais pas remarqué qu’elles avaient fait mieux en matière de politique de santé quand elles étaient au pouvoir.

Et elles ne se sont pas couvertes de gloire dans l’épisode des municipales : je revois Christian Jacob, à l’idée de repousser le 1° tour, hurler au coup d’état dans les couloirs de l’assemblée. Il est plus discret, aujourd’hui qu’on en connait l’impact sur la dissémination.

D’ailleurs, il suffit de remarquer qu’il y en a deux autres qui font profil bas et que l’on n’entend plus depuis trois mois : Sarkozy et Hollande. Pas parce qu’ils sont confinés, mais parce qu’ils n’ont pas de meilleur plan à vendre. C’est sûrement la 1° fois qu’ils ne regrettent pas de ne plus être en responsabilité !

Vous n’êtes naturellement pas obligés d’être de mon avis, tout ça, c’est juste pour causer…

Dans ces circonstances, Nico et François doivent avoir le temps de lire.

A ce propos, merci à  Jeannette et Christine, qui nous ont opportunément rapporté ce qu’écrivait Madame de Sévigné à sa fille Pauline de Grignan :

« Surtout, ma chère enfant, ne venez point à Paris !
Plus personne ne sort de peur de voir ce fléau s’abattre sur nous, il se propage comme un feu de bois sec. Le roi et Mazarin nous confinent tous chez nous. Cela m’attriste, je me réjouissais d’aller assister aux prochaines représentations d’une pièce de Corneille dont on dit le plus grand bien.
Nous nous ennuyons un peu et je ne peux plus vous narrer les dernières intrigues à la Cour, ni les dernières tenues à la mode.
Heureusement avec ma chère amie, Marie-Madeleine de Lafayette, nous nous voyons discrètement, et nous nous régalons des Fables de La Fontaine, dont celle, très à propos, « Les animaux malades de la peste » !
« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés » ».

Je vous envoie deux drôles de masques ; c’est la grand’mode. tout le monde en porte à Versailles. C’est un joli air de propreté, qui empêche de se contaminer,

Grignan, à moins de 20km d’ici, où c’est toujours la routine :

Agnès a franchi le cap des 250 masques et va pouvoir passer le relais à l’industrie textile, il était temps, elle y a sacrifié 5 protège matelas. Admirez le choix des motifs.

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Et le modèle « Gendarmerie Nationale », plus sobre:

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Mais tout ce travail valait la peine, ses efforts ont été reconnus dans le monde entier, merci pour ça à François.

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Entre temps, la centrale à béton a réouvert. 3 toupies, et la dalle était coulée.

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Deux semaines de prise et on peut se déplacer dessus pour nettoyer au karscher les murs du hangar, avant peinture.

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Comme j’ai, pour cette opération une belle combinaison intégrale verte, Agnès, espiègle, m’a inscrit au casting pour la pub Cetelem.

Quoi d’autre? Ah, oui, nous avons préparé des falafels.

Avec difficulté: notre mixer n’est pas très adapté, la pâte se colle aux parois, et la lame brasse de l’air. Pour s’en sortir, une seule solution, allonger avec de l’huile et de l’ eau.

Mais alors, impossible de former des boulettes. On se contentera de frire des genres de pancakes. Si, quand on les retourne, on a le geste vif et la main sûre, c’est présentable. Mais si la main tremble, ce qu’on obtient ressemble au fruit des amours coupables d’un falafel et d’une galette bretonne, après un accident..

Entre temps, on regarde pousser les salades et les Charlottes, on tiendra jusqu’à l’hiver.

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Avant de se quitter,  pourquoi « Le journal du Hard « ? Parce-que, aujourd’hui, Hélas, il A Rien à Dire…

Restez au chaud et à bientôt.

Suze la Rousse.  Dimanche 31 mai.

De l’autre côté de la frontière, il y a la Belgique.

Et cette frontière, je la franchirai chaque jour, pendant 7 ans.

Et oui, je vais reparler de moi !

J’ai hésité longtemps, ma dernière chronique, quatre semaines déjà, n’ayant manifestement pas soulevé l’enthousiasme. Est-ce parce que j’y défendais l’exécutif ? Le péché est pourtant véniel, mais le sujet si sensible qu’il vaut mieux, maintenant, se cantonner à une réserve prudente et laisser le débat politique aux commentateurs professionnels.

Avec toutefois une dernière remarque, je m’en voudrai de ne pas la faire :

Les français détestent leurs élites, et plus particulièrement leurs dirigeants. Ils se font même gloire d’en raccourcir un de temps en temps.

Est-ce parce qu’ils ont le sentiment d’être cocus quand leurs actes divergent trop des promesses de campagne ?

La France de gauche a élu Hollande en 2012, a eu Guy Mollet et n’a pas attendu 5 ans pour le larguer, le pauvret, qui n’a même pas pu se représenter.

La France du milieu a élu Macron en 2017, et a eu Juppé. Il se retrouve en 2 ans à 30% de popularité et ne sait plus sur qui s’appuyer. Il en est à cajoler le professeur Raoult, à flirter avec Philippe de Villiers, à prendre des nouvelles d’Eric Zemmour et à s’enquérir des états d’âme bistrotiers de Jean Marie Bigard.

Son électorat s’interroge..

Par contre, si la France de droite a élu Sarkozy en 2007, elle a bien eu Sarkozy, ce qui ne l’a pas empêchée de le lâcher en 2012 et de l’éliminer en 2017.

Nous avons manifestement un double problème, institutionnel bien sûr avec la non-représentativité de nos élites, mais aussi culturel avec, par le dénigrement et la contestation systématique des décisions prises par ceux que nous avons élus, une incapacité évidente à accepter d’être dirigés.

La preuve : le mouvement des gilets jaunes, qui exprimait la rage compréhensible des laissés pour compte, un peu attisée quand même par les extrêmes, a avorté, tant ses partisans mettaient de persévérance à éliminer chaque leader potentiel, se privant de toute capacité de négociation, de toute force politique, faute de représentant légitimé.

Aujourd’hui, on en est même à faire des procès au président, aux ministres, procédures qui ne mèneront à rien, sauf à engorger encore plus le système judiciaire, et engraisser les avocats qui mènent le bal.

Et pendant ce temps, Boris Johnson, aussi menteur que Trump et pas moins filou, est au sommet de sa popularité, Conte, en Italie, s’est taillé une stature d’homme d’état, la 1° ministre belge est appréciée de tous et même Angela Merkel, qui, jusqu’à la semaine dernière, était le chantre du conservatisme béat, n’a jamais été aussi haut dans les sondages.

Il y a des jours, c’est dur d’être français…

C’est pour ça que, au fond, passer la frontière tous les jours, même au prix de 250km quotidiens (bonjour l’empreinte carbone !), ça rafraichit.

Parce- que, de l’autre côté, il y a les belges.

Et les belges, c’est comme des français, mais en bien mieux : ils peuvent se passer de gouvernement pendant plus d’un an, sans s’émouvoir !

La Belgique est le pays, où quand une fille vous fait la bise, elle n’en fait qu’une.

Et vous, la joue dans le vent, vous êtes comme un con, à attendre la suite, puisqu’en France, on ne s’en tient pas là.

Elles ont raison : quatre bises, à quoi ça sert ? A part propager les virus…Et elles sont si chaleureuses qu’une suffit !

Un belge, ça vous tutoie en 5 minutes, ça vous paie une pinte au bout de dix, et ça vous pardonne d’être français au bout de 15.

Ça peut vous faire chanter en canon 100 inconnus, debout sur une table, après quelques bières, quand même.

Ça ignore la distance hiérarchique, ça ne craint pas de poser des questions qui fâchent à ses dirigeants et ça goûte peu la langue de bois.

Ça ne décapite pas ses monarques, ça les regarde d’un air affectueux, amusé même, quand ils sèment des enfants illégitimes aux quatre coins du royaume.

Ça admet l’autorité, ça aime son gouvernement, quand il y en a un, et ça se vante d’avoir, vu le système fédéral, plus de ministres des sports que de médaillés aux jeux olympiques.

 

 

Ça vous compose  » Dans le port d’Amsterdam », émotion pure sur lamento d’accordéon, ça vous invente la B.D., et ça vous écrit plus de 100 romans d’atmosphère, où le commissaire Maigret promène son regard  compréhensif sur les turpitudes et les faiblesses de ses semblables.

Et je ne parlerai pas des primitifs flamands, limitons nous au contemporain.

Il faut bien toute cette créativité, cette fraicheur chaleureuse, cet optimisme, cette foi en l’avenir pour supporter ce qui gangrène la Belgique : l’antagonisme historique entre les régions néerlandophone et francophone, dans un pays qu’on traverse en deux heures..

Je ne chercherai pas à en analyser les causes, d’autres, plus compétents, l’on fait, et la conclusion la mieux partagée s’exprime sobrement : « si vous avez compris quelque chose à la Belgique, c’est qu’on vous l’a mal expliquée… »

Un simple constat : ici, tout est passé au filtre de cet antagonisme, le moindre fait divers donne lieu à des analyses comparatives entre les « performances » de chaque communauté, que ce soit le taux de délinquance, les excès de vitesse, les violences conjugales ou la consommation de bière.

Antagonisme qui mène à des absurdités pures : pour éviter le grignotage des communes néerlandophones périphériques de Bruxelles, région Capitale, par les francophones, il est interdit, dans les services publics, d’y parler le français, même si les fonctionnaires le pratiquent couramment !

La majorité en souffre, les minorités militantes, en particulier flamandes,  cultivent cette opposition, entretiennent le brasier en commémorant les batailles où la piétaille flamande, ne comprenant pas les ordres de ses officiers, s’est faite tailler en pièces. Elles luttent pour, un jour, faire exploser le pays.

Et pour faire bon poids, non seulement les belges francophones les insupportent, mais les français aussi.

Pour en témoigner une anecdote, longuette, mais illustrative :

Dans la fin des années 80, je suis chargé de coordonner pour l’Europe les politiques environnementales de l’entreprise américaine qui m’emploie. A ce titre, je dois organiser la tournée des usines que vient effectuer Adrienne, ingénieur US et experte en technologies de traitement des émissions atmosphériques.

Et ça comprend aussi les activités touristiques du weekend, on ne va quand même pas la laisser seule dans sa chambre d’hôtel ! Valenciennes, le dimanche, y a mieux.

On décide donc une virée sur la côte belge, avant de la ramener à Zaventem où elle prendra un vol pour Dusseldorf, elle est attendue lundi à notre usine de Wuppertal.

Première étape à Bruges, comptoir hanséatique et bijou architectural. La ballade sur les canaux s’impose, d’autant qu’Adrienne, la cinquantaine assumée, surcharge pondérale bien établie, se déplace avec un léger dandinement qui condamne les longues promenades.

Déjeuner à Ostende où nous dégustons, sur les quais, dans le parfum iodé des embruns, l’extraordinaire assortiment de produits de la mer, rollmops en marinade, anguilles fumées, moules au vinaigre, pinces de crabe mayonnaise et une variété d’autres préparations au goût si marqué qu’il ne peut se concevoir sans le soutien d’un blanc sec, bien pierreux, ou d’une bière locale, bien houblonnée.

En parler me fait saliver, et me rappelle, ému, le waterzoï de poulet, et sa duxelle de petits légumes, le potjevleesh de viandes blanches à la gelée délicieusement parfumée au genièvre, la carbonnade de joue de bœuf, fondante, où l’amertume de la bière est équilibrée par l’aigre doux du vinaigre de framboise, et les frites, dorées, croustillantes et moelleuses à coeur, trésor national, frites au blanc de bœuf, bien sûr..

Adrienne, qui n’a pas été élevée qu’au coca-cola, apprécie le déjeuner, et l’heure du départ arrive trop vite.

Mais la voiture, garée au pied de la capitainerie, refuse de démarrer…

J’ai beau titiller la télécommande, rien n’y fait. La pile doit être naze

On rassure Adrienne, on va régler ça très vite. Je trouve un bazar susceptible de vendre des piles, mais ils n’ont plus le bon modèle. Curieusement, un jeune français, derrière moi, sa télécommande à la main, est dans la même situation. Je me fais indiquer un autre point de vente et m’y précipite. Il est hors de question de me faire griller sur le fil, au cas où ce second magasin ne détiendrait plus qu’une pile !

Retour vainqueur, je rassure à nouveau Adrienne, et… ça ne démarre toujours pas.

Seule solution, il faut appeler l’assistance. Mais, rappelons-le, dans les années 80, les téléphones portables n’existaient pas, l’internet n’était pas encore inventé, l’Euro n’était même pas un concept. La préhistoire quoi !

Et bien sûr, je n’ai pas le N°. Il faut donc trouver une cabine téléphonique, avec de la monnaie qui va bien, appeler des amis, qui, par chance en ce dimanche ne sont pas de sortie, Nadine s’en souvient encore, leur laisser le temps de chercher, les rappeler, contacter enfin l’assistance, puis attendre la suite.

Le temps a filé, Adrienne a raté son avion, mais elle a bon caractère et, semble-t-il, confiance en moi pour trouver la solution. Heureusement, la gare est à 500m, on s’y dandine gentiment en trainant la valise à roulettes sur les pavés, pendant qu’Agnès guette le dépanneur.

Coup de bol, un train pour Liège, avec correspondance pour Dusseldorf, part dans la minute. Je presse Adrienne, un peu perdue, la guide vers le train, grimpe avec elle, l’installe dans la 1° voiture. J’entends un coup de sifflet, il faut y aller. Je lui fais la bise en lui assurant que tout va bien se passer, et lui souhaite un bon voyage..

Le train commence à bouger, j’appuie sur le contacteur d’ouverture des portes. Rien ne se passe !

Ça se gâte,, je traverse le wagon en courant pour gagner les portes suivantes, sous le regard surpris des voyageurs, et d’Adrienne, (au passage, ici, on dit ouagon..). J’appuie un peu plus frénétiquement sur le contacteur.

Toujours rien, et le train prend de la vitesse.

Panique ! Agnès ne parle pas flamand, n’a pas de francs belges, pas de téléphone, pas de voiture. Aller jusqu’à Liège et la laisser seule ? Impossible !

Seule solution : je percute le signal d’alarme, et m’accroche. Sifflement brutal de l’air comprimé, hurlement des freins, bagages qui valdinguent, et les portes s’ouvrent enfin, dans un chuintement qui couvre les protestations…

Je saute sur le quai, bat mon record personnel du 100m, et me planque derrière la cabine téléphonique où Agnès m’attend. Il lui faudra un peu de temps pour comprendre pourquoi j’ai les yeux hors de la tête et le souffle court.

On quitte bien vite la gare, discret, gagne une terrasse de bistrot, et attendons le camion de dépannage.

Surprise, c’est une toute petite voiture jaune. Le mécano récupère mes clefs, ouvre la voiture, se penche sous le tableau de bord, appuie sur la télécommande, et le système se déverrouille !

« Vous êtes garés près de la capitainerie, et les émetteurs sont si puissants qu’ils brouillent les télécommandes, il faut se rapprocher du récepteur du véhicule »…

Les type, au bazar, le savaient, tout Ostende le sait !

Mais on laisse ces couillons de français chercher des piles, courir à droite, à gauche, se cailler le sang, appeler les dépanneurs.

Ça distrait, il n’y a pas grand-chose à faire, le dimanche, Jacques Brel l’a écrit avant moi..

Et Adrienne dans tout ça ? J’aurais de ses nouvelles le lendemain. Elle a raté sa correspondance, son train étant parti en retard : un connard a tiré le signal d’alarme..

En plus, elle s’est pris une prune, étant en 1° avec un billet de seconde, n’avait que des dollars, d’où embrouilles avec le contrôleur, imperméable à l’anglais, puis est enfin arrivée, en milieu de nuit, à son hôtel de Wuppertal, où tu te rends compte ? elle n’a même pas pu avoir un sandwich. Elle s’en souviendra, de sa virée sur la côte belge…

Je crains que, depuis cette époque, et avec la montée du Vlaams Belang, l’extrême droite flamande indépendantiste, ça ne se soit pas vraiment amélioré, côté dialogue intercommunautaire.

Mais ça ne refroidit pas la joie de vivre de nos petits camarades : à Mons, on prend une semaine de congés pour le Doudou, carnaval débridé aussi chaud que celui de Dunkerque. Lorsque des séminaires professionnels se tiennent en Belgique, les « after hours » n’en finissent pas, rythmées par les tournées de bière.

Et, lors de soirées entre amis, on y tangue avec Adamo sur « les filles du bord de mer », et on y danse « les sardines » en sautant avec une belle énergie, jusqu’aux petites heures.

Ils nous manquent, nos amis belges.

Baudouin, Tata, Jean Marc, Patrick, Caro, Anne, Pierre, on est impatients de vous revoir, mettez les bières au frais, on arrive !