Dimanche 07 0ctobre. Jour 27 : Corumba / Agua calientes
8h30, on est à la frontière, tout juste à 4km de la Pousada. Nous remplissons les formalités de sortie auprès de la Police Fédérale, mais, côté Douanes, le fonctionnaire chargé de récupérer notre autorisation temporaire d’importation n’est pas là. Le douanier de permanence nous indique qu’il faudra revenir à 12h. Retour donc à Pousada di Peralta, et, pour passer le temps, on blogue..
A 12h, le fonctionnaire n’est toujours pas là. Le douanier se décide à lui téléphoner, et reçoit (on imagine..) instruction de récupérer le document. Il aurait pu le faire le matin !!
Au service d’immigration bolivienne, la charmante fonctionnaire tamponne rapidement nos passeports, mais pour 30 jours seulement ! Si l’on veut plus, il faudra le solliciter auprès des services de l’Immigration, à Santa Cruz. On n’est pas chaud pour se taper une queue dans des bureaux, on verra si nécessaire. A la douane, c’est un peu plus long, c’est la pause casse- croûte, mais on obtient l’autorisation temporaire, 30 jours itou.
On file, et au bout de 5km, contrôle de police. On nous demande une autorisation de circuler que nous n’avons pas. Il est vrai que, au sortir de la douane, un voyageur nous avait informé qu’il y avait encore un bureau de police où accomplir une formalité, mais je n’avais pas voulu en tenir compte : lors de nos deux précédents passages en Bolivie, jamais ce document n’avait été établi.
Les policiers essayent de nous faire comprendre qu’il faudrait rebrousser chemin pour faire établir cette autorisation, mais je prends mon air benêt (j’y arrive assez bien) No entiendo….
Ils se lassent et nous laissent partir. Cela ne doit pas être si important..
On poursuit jusqu’au camping Toucan, à Agua Calientes, et court se plonger dans la rivière. Elle est chaude, très chaude ! Ce n’est pas ce que nous recherchions par 35°, mais on n’aurait pas dû être surpris, vu le nom du lieu.
Nous avions déjà vu des sources chaudes, des saunas naturels, mais une rivière chaude de 150 m de large, jamais !
S 18° 27’ 11.4’’ W 059° 30’ 41 .0’’
Km 231 Total 5372
Lundi 08 octobre. Jour 28. Agua Calientes – Pozzo del Tigre
Baignade dès le petit matin, on cherche les toucans. Agnès en voit un, de loin…

Puis on se rend au camping Hervores voisin , pour rechercher la source de cette rivière. Ce camping, moins cher, est bien plus fréquenté que le camping Toucan où nous étions seuls, mais beaucoup moins bien aménagé, moins bien entretenu, et avec un accueil moins chaleureux : il faut payer pour aller aux toilettes ou prendre une douche. On ne regrette pas notre choix, la camping Toucan valait vraiment le détour.
En bordure du camping, les bouillonnements des résurgences agitent le fond sableux, elles se trouvent là, à une trentaine de cm de la surface.

Quelques personnes font trempette, dont de jeunes couples campant sur place; les femmes se baignent habillées : la région est un important foyer de mennonites.
Curieux de tester la température des résurgences, nous nous en approchons, quand le sol soudain devient fluide. Agnès, plus proche, s’enfonce jusqu’à la taille, et moi jusqu’au genou, mais un coup de rein nous permet d’échapper au piège de ce qui ressemble à des sables mouvants. Pas très malins, une minute de réflexion nous aurait permis d’éviter cette petite frayeur : l’eau bouillonnante remontant de cheminées souterraines fluidise le sable, qui n’est plus porteur localement.
Quittant le village, nous prenons la belle route de l’ouest, rectiligne et déserte, qui longe la voie ferrée. Elles séparent la région du Chacos, qui s’étend jusqu’en Uruguay et au nord de l’Argentine, du Pantanal bolivien. Petit détour vers le nord, pour atteindre Santiago de Chiquitos, calme village à l’église jésuite, fermée hélas le lundi. Les traces de l’enseignement jésuite, intégrant une formation musicale subsistent : la statue du centre de la place n’est pas celle d’un grand homme, mais un violoncelle !

Ballade ensuite jusqu’au mirador, éperon rocheux qui domine les vallées de part et d’autre.
On pousse jusqu’à San José de Chiquito. Chez YPF la responsable de la station-service nous confirme que, dans toute la Bolivie, les stations ne prennent pas les cartes bancaires, et que le prix pour les étrangers est plus du double que pour les locaux (8,88 bolivianos le litre de gazole contre 3,72). Tarif justifié par un reçu, dûment identifié.
Il faut donc trouver du cash, et le premier DAB ne fonctionne pas. Le second a l’air si vieux qu’on se refuse à lui confier nos cartes. Heureusement, un local qui nous a vu en difficulté nous en indique un qui fonctionne. Celui-ci ne délivre que 500 bol à chaque retrait, soit environ 65€, mais il accepte plusieurs retraits successifs (bonjour les coms..)
On se consolera dans un resto indiqué par notre guide, sur la place principale : « Sabor chiquitano », spécialisé dans la cuisine régionale. A propos, pourquoi la population, et par suite la région, s’appelle t’elle « chiquitano » ? Parce que les conquistadores, pour rentrer dans les maisons devaient se baisser, les portes ayant un linteau très bas. Ils en conclurent que les habitants étaient petits, et les dénommèrent ainsi, alors que la raison principale en était une défense plus facile…
Le repas, excellent, nous ayant coûté 9€ à deux, on se dit que l’on ira souvent au resto, ce qui par ailleurs nous évitera de cuisiner par cette chaleur !
Visite de l’église jésuite, d’une grande simplicité, mais la Mission n’a pas l’ampleur de ce que nous avions vu au Paraguay ou en Argentine : ici, toutes les habitations indigènes et la partie vivrière ont disparu, remplacées par des habitations de style colonial aux galeries ombragées qui bordent trois des côtés de la vaste place d’armes. Ne subsistent que l’église, avec son cloitre et son monastère, ornées des fresques caractéristiques du style jésuite chiquitano. Elles abritent encore des activités pastorales.




Partout sur les murs du village, et même sur les poubelles devant la mission, le masque de San Jose, arboré lors du carnaval, blanc aux pommettes rouges.

Nous reprenons la route, toujours aussi rectiligne mais de plus en plus dégradée, sur une centaine de km. Dans les villages ou les exploitations agricoles, nous constatons la présence de nombreux mennonites, reconnaissables à leur type slave, à leur dialecte germanique et à leurs vêtements : casquette de base ball, chemise manches roulées et salopette pour les hommes, robe longue, foulard et chapeau de paille pour les femmes.
Secte pacifiste et ennemie du progrès née en Allemagne au XVII°, ses membres émigrèrent en Russie, puis de nouveau persécutés, émigrèrent en masse au Canada au début du XX° siècle, jusqu’à ce que le gouvernements veuille leur imposer le service militaire et l’enseignement de l’anglais dans les écoles publiques. Ils vinrent donc, à partir de 1960, s’établir en Amérique du sud, surtout dans la région de Santa Cruz, où ils seraient près de 70 000. Ennemis du progrès, ils ne rejettent cependant pas, comme le font les Amish de Pennsylvanie, l’électricité et la mécanisation, puisque nous les verrons piloter tracteurs et pick ups. Mais les convictions restent fortes et l’endogamie absolue.
Nous nous arrêtons pour la nuit sur la place de Pozo del Tigre, près de l’école.
S 17° 36’ 09.4’’ W 061° 59’ 23.8’’ Altitude 290m
Km 361 Total 5733 34° à 17h45
Mardi 9 octobre. Jour 29 Pozo del Tigre / Puente San Ramon
Départ matinal, à 6h30 nous sommes en route sur le circuit des missions, dont nous ne bouclerons pas le tour complet, peu attirés par le ripio de sa partie nord. L’étape suivante est à San Javier.
Bonne surprise : l’employé d’une station-service nous confirme le prix pour les étrangers, puis, bon prince, nous fait payer au tarif bolivien. Nous y repasserons au retour! La mission du village de San Javier présente un plan classique, jolie place d’armes et édifices religieux superbement rénovés.





Joli petit musée, sur la place, avec une petite collection de masques mais ici, les fresques carnavalesques montrent surtout le masque de San Javier, au nez, bouche et yeux jaunes.



La route, qui après Puente San Ramon s’engage dans de belles collines, a un revêtement tout neuf, c’est un plaisir d’enchainer les courbes jusqu’à Conception.
C’est ici qu’on peut visiter la plus belle des trois missions construites par Martin Schmidt, jésuite suisse, entre 1752 et 1755, peu de temps avant l’expulsion des jésuites d’Amérique du Sud. La rénovation de l’ensemble des missions chiquitanos, décidée par les autorités religieuses locales dans les années 80 et financée par les jésuites helvétiques, a été dirigée par l’architecte suisse Hans Roth, qui a consacré 27 ans de sa vie à les faire revivre.
Travail et résultats exceptionnels.





Nous visiterons dans la foulée un centre de formation à l’ébénisterie. Institution religieuse abritant aujourd’hui une vingtaine d’apprentis, ce centre a fortement contribué à la rénovation des missions, au niveau de la sculpture des colonnes, de la rénovation des statues et de la réfection des charpentes.

Demi -tour vers le sud et tentative de bivouac en bord de rivière à la sortie de village de Puente San Ramon. Il fait toujours 35° et on espère la fraicheur de la nuit (naifs..) quand une voiture vient se garer tout près de nous. Trois types en descendent, s’étirent avec un naturel de faux témoin et commencent à tournicoter dans les environs. On remballe vite fait, gagne la cabine en douceur et on se casse..
On revient vers le village et nous garons sur le parking d’une station-service. La nuit sera difficile, chaleur et raffut des camions étant peu favorables au sommeil.
S 16° 38’ 47.1’’ W 62° 30’ 28.3’’
KM 520 Total 6253
Mercredi 10 octobre. Jour 30. Puente San Ramon / Santa Cruz
Direction ouest, la route est beaucoup plus encombrée. Traversée du Rio Grande, quasi à sec, par un pont suspendu et, aussitôt, un 1° contrôle. Le jeune militaire sera très courtois et nous remerciera même pour notre coopération. 100m plus loin, nouveau poste de contrôle. Un policier nous stoppe, moins sympa, prends mes papiers et me demande si nous avons du combustible. Confirmation, notre jerrycan de gazole est bien visible à l’arrière. Il garde mes papiers et me demande de la suivre dans la guitoune. Là, il m’explique que c’est interdit (risque d’explosion !!) et que je dois payer une amende. Pour cela je dois laisser le véhicule sur place, trouver un bus pour Santa Cruz à 40km, trouver une banque, faire un dépôt bancaire et revenir avec un certificat de paiement, ce que, naturellement, je déclare impossible.
Mon air benêt sera totalement inefficace. Dans sa grande compréhension, il accepterait un paiement immédiat, même en monnaie brésilienne. Tarif ? : 500 bolivars, soit environ 65€.
Ils sont trois policiers, des civils autour qui savent très bien ce qui se passe. Nous sommes coincés.
Je parviens à faire baisser le droit de passage à 300 bolivars, qu’il se met illico dans la poche, au vu et au su de tous, m’explique qu’il fait ça pour m’aider, et me laisse reprendre mes papiers qu’il avait jeté sur un coin de table
On repart, je suis vert de rage et humilié d’impuissance. Mais, au fond, depuis qu’on nous parle de racket dans les voyages au long cours, en plus de 100 000 km, c’est la 1° fois. Espérons que cela ne deviendra pas la règle.
Bel orage qui fait, pas suffisamment, baisser la température. Nous arrivons à Santa Cruz et trouvons facilement l’auberge de jeunesse « La Jara » que Agnès a dénichée sur Ioverlander. Les renseignements étaient précis, elle constatera qu’ils avaient été fournis par Okan, lors de leur précédent passage. Ils indiquaient un passage étroit, on confirme, néanmoins on sera très bien : l’accueil est chaleureux, électricité, laverie et wifi comblent les besoins et , comme de juste, ici on est en mode jeune routard. C’est sympa et rassérénant.
La ballade dans le centre historique sera décevante. La place du 2 septembre est vide, de nombreux immeubles dans un état de décrépitude avancée, les terrasses vantées par notre guide introuvables. De plus, la cathédrale est sans intérêt et l’ambiance, sous le crachin, celle d’un jour de Toussaint.. On doit être de mauvaise humeur! Il faut dire que j’ai aussi paumé ma carte bancaire, mais ça, ça se règle facilement grâce à la « Conciergerie BNP » qui nous expédiera en urgence une nouvelle carte chez Martine, à La Paz
S 17.77812° W 63.17088’ Km 188 Total 6441
Jeudi 11 octobre. Jour 31. Santa Cruz / Samaipata
10 mn de marche pour atteindre le marché, fort vivant, où l’on fait quelques emplettes. On se limitera aux fruits et légumes, les étals de boucherie, triperie et volailles nous paraissant moins enthousiasmants.
Recherche du Musée Guarani, on le trouvera fermé sans motif, et on quitte Santa Cruz, avec une image un peu différente : la ville s’est développée le long de son boulevard circulaire, au détriment du centre, boulevard bordé par les hôtels des chaines internationales et les tours du quartier d’affaires, pétrole oblige.
Nous attaquons les premiers contreforts de la cordillère orientale, pour nous rendre au fort de Samaipata. A 1900 m d’altitude, il s’agit d’un site où les incas établirent à la fin du XV° siècle, sur des vestiges de civilisations plus anciennes, Chane puis Guarani à partir des années 1200 de notre ère, un temple, et y sculptèrent, dans un épaulement de tuf, le plus grand pétroglyphe connu.

Autour du temple se déployait un ensemble d’habitations et de magasins de stockage, caractéristiques de l’économie inca. De ces constructions, ne subsistent que les soubassements en pierre des murs, dont la partie haute était construite en adobe, mais les reconstitutions faites par des archéologues permettent d’imaginer ce qu’était ce village, que les espagnols occupèrent ensuite pour en faire un fort et se protéger des attaques indigènes.

La faible qualité de la lumière en ce jour humide ne nous permettra pas de distinguer l’ensemble de sculptures zoomorphes, jaguar, puma, serpent, dont est orné le temple, mais le mur en L, à usage astronomique, et les niches abritant les momies restent bien visibles.

On s’interrogera aussi sur la destination de la chincana, puit artificiel de 16 m de profondeur et 1,4 m de diamètre : tunnel de fuite ? puit ? cachot ?

Nous redescendons vers la petite ville de Samaipata, à la place centrale très agréable, trouvons un guide pour la ballade du lendemain et nous garons pour le bivouac sur cette place, bien calme hors saison. Notre véhicule attire une famille française dont les trois enfants meurent d’envie de le visiter. Agnès fait le guide, et apprendra que le père, hydrologue, est basé à Lima et couvre des projets au Pérou et en Bolivie pour le ministère de la coopération. Ils nous invitent chez eux, à Lima. Pourquoi pas ?
S 18° 10’ 47.1’’ W 63° 52’ 34.0’’ Altitude 1676m, on sort la couette.
Km 142 Total 6583
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