Dimanche 03 novembre. Jour 18   La Florida / Tornamesa

La gestionnaire de l’hacienda nous le confirme, pour Lima, il vaut mieux compter en heures de route qu’en km :10heures de route pour 240km !

Peu de trafic jusqu’à La Oroya, et deux cols, dont l’un à 4227m sans difficulté particulière. On imagine donc que le pire est à venir. De fait, la traversée de La Oroya est un peu difficile, un flux de camions y naissant : cette ville est le cœur minier du Pérou, on y longe des usines d’affinage de métaux et une gare de triage, et elle est proprement hideuse. Elle serait l’une des plus polluées au monde, le taux de métaux dans le sang dépasse la norme chez 9 enfants sur 10, mais les habitants se battent pour conserver les usines…

Enserrés dans le flux de camions, nous attaquons l’Abra Anticona, qui culmine à 4822m. De part et d’autre de la route, des mines, des usines de traitement métallifère et des terrils. Arrivés au sommet, on peut se dire qu’on s’est fait le mont Blanc, en voiture, mais pas tous seuls.

Nous perdons de l’altitude dans des gorges spectaculaires où s’entrecroisent les meccanos géants des ponts de chemin de fer et les vestiges des ponts de l’ancienne route.

A San Matteo, en sortie de gorges, pour corser le tout, blocage total : c’est la fête de la danse et les groupes défilent dans la rue. Il n’y a qu’à attendre et admirer les costumes.

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Très longue descente, pour perdre 3300m d’altitude en 60km, dans une vallée étroite.  A chaque fois que l’espace se dégage, c’est la ruée pour doubler. Le moins réactif reste derrière les camions, au pas…

On fait de même, et ayant rapidement adopté le mode de conduite local, je me fais une belle ligne continue dans une large courbe. Manque de pot, en sortie de virage, une escouade de flics se tape sur le ventre en guettant les fautifs.

Coup de sifflet, rangez- vous, documentos…

J’ai droit au bis repetita de notre racketteur bolivien : vous allez à la ville, vous payez l’amende (498 soles) dans une banque et vous revenez avec le reçu. Etant 100% en tort je n’ai qu’à faire profil bas. Et comme en plus mon pandore est compréhensif, il veut m’aider….

Je m’en sortirai avec une punition de 200 soles (environ 50€), directement dans la poche. Et tout ça à 10m de l’officier commandant l’escouade !

Ça finirait par agacer.

Nous arrivons en début d’après-midi à la » Casa de los titiriteros », où nous devrions pouvoir bivouaquer.

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Surprise d’y trouver de jeunes compatriotes, formé(e)s au street art, et qui, au titre du service civique, assurent des missions artistiques auprès d’ados dans le cadre d‘une association animée par une franco -péruvienne. Moment d’échanges agréables, leur enthousiasme est rafraichissant.

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S 11° 54.186’    O 76° 30.934’   Altitude 1500m

Km 182 Total 2328

Lundi 04 novembre  Jour 19  Tornamesa   / La Vegueta

On quitte nos jeunes artistes, et reprenons la descente.

Tout le long de la route s’alignent des « lavaderos », qui bénéficient de l’eau de la rivière canalisée dans des conduites forcées. Un bon nettoyage du véhicule s’impose, en particulier au niveau des panneaux solaires, encrassés par l’hivernage à Cuzco.

A 50km de Lima, les agglomérations se multiplient et le trafic se densifie. A un feu rouge, nous observons le rassemblement matinal d’une escouade de police, le chef donne ses instructions aux agents alignés, qui lui prêtent une oreille distraite. 500m plus loin, un motard nous rattrape, il a dû nous repérer au feu, et rebelote.

Rangez- vous, documentos…Air connu

Il tourne autour du véhicule, teste la fixation de notre plaque d’immatriculation. Manifestement, il cherche….

Nos papiers en main, il nous indique alors que notre véhicule n’arbore pas les bandes réfléchissantes règlementaires au niveau des bas de caisse.

Cela fait bientôt deux mois que nous circulons au Pérou et c’est la 1° fois que la question se pose ! Il nous indique qu’on n’en trouve pas avant Lima.

Et là, j’ai une pensée pour les prêcheurs qui, à longueur de blogs, vous indiquent qu’il ne faut jamais payer, se montrer ferme, faire semblant de ne pas comprendre l’espagnol et exiger de se faire accompagner au commissariat : le type nous invite de lui- même à le suivre au commissariat et maitrise parfaitement google trad sur son téléphone…

Accueillis par deux policiers, on nous oriente sur un petit bureau où notre motard nous ressort le même numéro : l’amende est de 336 sols, mais, ému par l’émotion (fort bien surjouée par Agnès), il veut bien nous aider moyennant 100 sols.

On paye, et quand on lui demande où se procurer des bandes réfléchissantes, il fait un geste indiquant que ça n’est pas nécessaire, et nous laisse partir…..

Moins d’un km plus loin, on trouve une boutique où le patron passera une demi- heure à nous poser, très soigneusement, (ça colle bien, la voiture est propre!) 2,50m de ces bandes rouges et blanches, pour 42 sols. Il a mal choisi son métier, pour s’enrichir, il aurait mieux fait d’entrer dans la police…

Arrivés dans les faubourgs de Lima, le plafond est si bas, brume ou pollution ? la circulation si anarchique, et notre niveau de confiance dans la police locale si sévèrement entamé, que nous décidons d’abandonner notre projet de visiter la ville et prenons la direction  de la «panaméricaine nord » par une voie rapide. Elle n’a de rapide que le nom, puisqu’on y trouve des intersections, sans feux, avec des avenues fort chargées, et on y notera même des semi -remorques faisant demi -tour sur place, au milieu de carrefour ! 2 heures pour parcourir une vingtaine de kms, on ne regrettera pas Lima.

Sortis de la mégalopole (10 millions d’habitants, près d’un tiers de la population péruvienne), ça se dégage et on se retrouve dans le même désert côtier que celui que nous avions traversé au sud du pays : bonne route, dunes, et des dizaines d’élevages industriels de poulets.

Nous quittons la panamericaine à La Viguetta pour chercher un bivouac en bord de mer, derrière une piscine « olympique » fermée en cette saison. Plage de galets, où les locaux viennent extraire du gravier, et gros rouleaux, pas l’endroit idéal pour une baignade, mais on est « face à la mer.. » pour se préparer un petit mojito et oublier les ripoux..

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S 11° 01.545’   O 77° 38.993’

Km 225 Total 2553

Mardi 5 novembre Jour 20   La Vegueta / Chavin de Huantar

Nous nous dirigeons vers l’intérieur et la cordillère blanche. Très longue montée pour atteindre l’Abra Kaiuasi, avec un orage de grêle qui nous empêche d’admirer les sommets enneigés. L’ascension se termine par un tunnel à 4515m d’altitude, à la sortie duquel une statue joue les Corcovado pour bénir les voyageurs parvenus jusqu’ici, (qui le méritent bien), puis rapide descente sur la vallée de Chavin, très encaissée.

Arrivés en début d’après- midi, on se gare dans terminal de bus, immense et vide. Le plafond est bien bas.

Pour se remettre de nos émotions, on se fera un petit menu sympa au restaurant «Chavin turistico » qui, selon notre guide, est recommandé par les archéologues qui continuent à fouiller les vestiges du temple pré inca qui justifie notre visite. « Trucha a l’ajo » et « piquante de cuy » (devinez qui a choisi quoi ?), après un petit pisco sour, nous réconcilieront avec la région. (ce voyage n’est pas sponsorisé par Paul Ricard !)

S 09° 35.093’    O 77° 10.526.707’   Altitude 3150m

Km 292   Total 2845

Mercredi 6 novembre Jour 21   Chavin – Huaraz

La civilisation de Chavin s’est développée de 1200 à 800 avant notre ère, dans cette vallée d’altitude. Le témoignage le plus impressionnant en est ce temple, construit en bouchon dans la vallée, au prix d’un détournement du rio pour aménager l’espace nécessaire.

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Peu de fréquentation, des visites pédagogiques. Les gamins largueront vite leurs uniformes contre des tenues de sport une fois la traditionnelle photo effectuée.

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L’illustration ci dessous donne une idée des proportions de l’édifice principal.

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Espace cérémoniel, dont l’orientation répondait à des considérations astrologiques relatives à la position du soleil aux solstices, comme dans les temples incas plus récents, le temple était composé de plusieurs zones dont celles des bâtiments, réservés aux prêtres. Le rituel visait à impressionner les foules par la mise en scène, la musique produite au moyen de conques marines et l’usage massif de plantes hallucinogènes. (Jean Michel Jarre n’a rien inventé..)

Dans le bâtiment principal, visite des galeries, ventilées et éclairées. Elles étaient destinées à des cérémonies privées, ainsi qu au stockage des offrandes et des instruments du culte. Au croisement de deux galeries, le « Lanzon ». Ce personnage monolithique représente la divinité principale du peuple de Chavin et est constitué d’une combinaison de caractéristiques humaines et animales.

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Au musée, construit par le Japon en guise de cadeau à la nation péruvienne, à l’extrémité du village, on admirera les reproductions de ces monolithes, une série de têtes qui ornaient les murailles extérieures du temple, des bas- reliefs finement gravés de motifs zoomorphes, de superbes poteries et une collection de conques marines.

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Le retour s’effectuera par la même route, via l’Abra Kaiuasi, avant de s’engager dans la descente vers Huaraz.

Bivouac sur une esplanade herbeuse, à l’arrière de l’hôtel Real Huascarian, en compagnie d’herbivores de diverses espèces.

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S 9° 30.798’      O 77° 31.863’    Altitude 3020m

Km 132   Total 2957 

Jeudi 7 novembre  Jour 22   Huaraz

Grand beau temps au réveil, nous pouvons ’admirer, depuis l’hôtel, les sommets jumeaux des Huascaran.

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Nous avons décidé de laisser le véhicule au repos. Dès l’aube (soyons honnêtes, dès 8h30), nous sommes en ville pour retirer du cash, déposer du linge à une lavanderia, et trouver l’excursion qui nous permettra d’admirer les sommets enneigés de la Cordillera bianca. Coup de pot, un minibus est devant une agence de voyages, et part dans 10 mn.

Première halte à Carhuaz, sa placette et sa fontaine aux statues naïves, puis Yangai , à une trentaine de km de Huaraz.

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Le 31 mai 1970, à 15h23, un tremblement de terre de 7,8 sur l’échelle de Richter détruisit totalement la ville coloniale de Huaraz, causant la mort de 30 000 personnes.

Quelques minutes plus tard, un pan de montagne se détacha du Huascaran Nord et des millions de tonne de glace, de roches, de boues et d’arbres arrachés se déversèrent dans la vallée, à près de 300 km/h, et vinrent ensevelir sous dix mètres d’éboulis le village de Yangai et ses 25 000 habitants. Les seuls survivants, une centaine de personnes, durent leur salut au fait qu’ils étaient dans un point haut du village, le cimetière…

Yangai a été reconstruit un peu plus loin, et les vestiges de l’ancien village sont devenus une étape obligée des excursions dans la région. Pas notre destination préférée, mais bon, une fois qu’on y est, on ne va pas rester dans le minibus…

Lente traversée de ce village mausolée, dont on ne voit rien, si ce n’est une carcasse de bus et des débris de l’église.

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La ballade se poursuivra par une longue montée sur une piste assez mauvaise, dans une vallée encaissée où les cultures florales égayent le paysage. Malheureusement les nuages arrivent et viennent masquer les sommets enneigés.

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L’excursion se terminera à Laguna Chinancocha.

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On y retrouve cette espèce singulière d’arbres, à l’écorce caduque  et dont j’ai oublié le nom, qui pousse jusqu’à 5000 m d’altitude.

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Lac glaciaire à 3850m d’altitude, cette « laguna » est située au cœur d’une réserve naturelle, sur les terres d’une communauté indigène, qui taxe les visiteurs, normal, leur permet de se restaurer frugalement grâce à des plats confectionnés dans des chaudrons bien culottés, (caldo de gallina ou piquante de cuy, ça devient une habitude) mais dont les membres se prêtent volontiers à la séance de pose.

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Retour à la nuit à Huaraz

Vendredi 8 novembre Jour 23   Huaraz / Chao

Montée raide pour quitter la ville et, coup de patins, un fil électrique barre la route au niveau de notre pare- brise, j’ai failli l’arracher ; Agnès parviendra à le soulever suffisamment pour que, au prix d’un démarrage en côte sympa, je puisse passer dessous.

Abra Punta Callan à 4210m pour traverser la Cordillera negra, puis longue descente dans une vallée très cultivée jusqu’à la côte, on retrouve alors le désert côtier. Au niveau de Casma, on quitte la panaméricaine pour rechercher la mer qui, si la logique est respectée, baigne les quais de Puerto Casma. En guise de quai, une vilaine plage, quelques bateaux de pêche sur cales et ce qui ressemble à une prison. Pas l’endroit idéal pour des vacances.

On trouvera quand même une gargote pour y déguster une chevice poissons/calamars.

Traversée de Chimbotte, premier port de pêche péruvien, en déclin en raison de la surexploitation des ressources, mais ville toujours très active. 90% des véhicules sont des taxis qui, pour marauder, s’arrêtent n’importe où, y compris sur les voies de gauche, contribuant à d’énormes bouchons.

L’odeur d’anchois qui baigne la ville nous fait renoncer à l’idée d’aller jusqu’au port : il ne doit ressembler que de très loin à un petit port de pêcheurs des cyclades…

La panaméricaine traverse maintenant une plaine côtière, où l’irrigation permet la culture de riz, et de canne à sucre, alternant avec les champs d’asperges et de piments. Les poulaillers industriels, typiques du désert, se font plus rares mais les poids lourds transportant des caisses de poulets sont toujours aussi nombreux !

Halte sur la place d’armes de Chao, envahie d’écoliers jusqu’à tard en soirée.

S 08° 32.361’    O 78° 40.769’ Altitude 100m

Km 288 Total 3245

 

 

 

 

9 commentaires pour “2019-11-09 Huaraz

  1. Annette Jean Louis le 10 novembre 2019 à 8 h 45 min a posté:

    J’aime beaucoup la nouvelle deco du camping-car, ça lui donne un air tout pimpant!!!.

    je pense que Cathy a pris des note,s histoire de mettre du beurre dans les épinards!!!
    bisous.
    jl

  2. Josette et Joël le 10 novembre 2019 à 9 h 35 min a posté:

    Comme à l’habitude, super voyage au petit déjeuner avec votre CR. Nous y sommes vraiment, documentation historique,, ambiance locale, tout y est. Merci pour ce partage et vivement le prochain.

  3. Philippe le 10 novembre 2019 à 10 h 33 min a posté:

    Après le café ☕, ça fait plaisir de vous lire.
    Fais gaffe quand même quand tu écris que tu t’es fait une ligne… Ça pourrait être mal interprété !
    Mais bon 50€ c’est kool, par rapport à chez nous !

    J’adore le mot « Lavenderia »… Il exprime tout. La fonction, les couleurs et les odeurs… Une petite photo peut être….

    Bises à vous 2 !

    Et maintenant un spot de pub….
    Demain 11/11, 8ème Salon des Vins organisé par VGC à la salle G. Brassens à Bollène.
    A partir de 10h00 !

  4. Bernard et Corinne le 10 novembre 2019 à 12 h 19 min a posté:

    Quelles aventures! On admire votre patience et votre flegme pour accepter les obstacles naturels et humains. N’avez-vous pas la tête qui tourne? Vous avez certainement un secret pour passer des sommets au plat pays.
    Merci pour les illustration toujours dépaysantes.
    On attend la suite…..
    Bises de nous deux.

  5. CUISINIER le 10 novembre 2019 à 22 h 15 min a posté:

    les sommets jumeaux des Huascaran !! wahoo !!! magnifiques !!
    La panaméricaine est décidément identique dans tous les pays qu’elle traverse. Au Panama, elle était pourrie et blindée de camions aussi.
    Plus de mal d’altitude ? Vous semblez ne plus en parler donc ne plus en souffrir ?
    Bises
    Nadine

  6. Coco Boom le 11 novembre 2019 à 9 h 44 min a posté:

    Magnifique reportage comme tjs pour narrer vos aventures. J’adore les pointes d’humour et votre calme face aux aléas humains et naturels.
    J’adore la photo d’Agnès avec la mer derrière. Par contre, j’ai été frappé par la tristesse (ou visage fermé) qui se lit sur le visage des enfants et des adultes.
    A bientôt. Bisous. Coco Boom

  7. Anonyme le 11 novembre 2019 à 19 h 34 min a posté:

    Portez des gilets jaunes avec bandes reflechissantes ca coupera la chique (une feuille de coca?) aux pandores andins. C’est qui qui mange du cuy ? A que voila une diversification interessante pour les animaleries,mais pas forcement dans l’air du temps.
    bises
    François et Josette

  8. michel et emmanuelle le 11 novembre 2019 à 20 h 14 min a posté:

    coucou !!
    bravo pour les photos des autochtones en costumes et des montagnes blanches!!
    et pour votre patience sur les routes de montagnes encombrées…
    qu’est-ce que le ‘cuy’ ??
    bonne route.Bises Michel

  9. jeannette et bernard le 12 novembre 2019 à 1 h 17 min a posté:

    il vous faut une belle dose de patience et de bonne humeur pour franchir les obstacles tant matériels que psychologiques , mais vous êtes entrainés …
    Pour nous , tranquillement assis dans notre fauteuil , c’est toujours un plaisir de lire ce récit imaginé . Même quand il n’y pas de photos à l’appui , on vous imagine , on vous voit à l’oeuvre , on vous entend presque discuter avec les  » ripoux » et autres autochtones …….
    Après deux semaines de vacances scolaires avec pas mal de petits enfants à héberger , je reprends mes esprits et le cours de mes occupations , et promet de commenter plus souvent votre passionnant récit . bises à tous les deux et bonne route !

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