Samedi 23 à mardi 26 novembre   Jour 39 à 42   Iles Galapagos

Pour embarquer dans le bateau qui nous mènera à Sante-Fe, ancré à moins de 50m, il faut prendre un bateau taxi, payant naturellement.

Peu cher, ½ $ par personne, mais on y voit, là encore, que toute l’économie de l’archipel repose sur le tourisme, qui assure plus de 90% des revenus en faisant vivre commerces, restaurants et hôtels, croisiéristes, chauffeurs de taxi, équipages de vedettes ou de bateaux taxis, sociétés de transport et guides. Au-delà du fait que seulement 3% de la surface est affectée aux activités « humaines », agriculture comprise, réservant de fait 97% aux espaces classés en réserves naturelles, le filon touristique est exploité au maximum. Et nous sommes en basse saison ! Fort heureusement, ici, on a su éviter la dérive « disneyland » que l’on a pu rencontrer ailleurs (les chutes du Niagara, et leur affligeant environnement !)

Il n’est ainsi pas possible de visiter une réserve, sans être accompagné par un guide local, les guides des agences de voyage n’étant pas accrédités. Peu de risques d’être en manque toutefois, 800 personnes exercent ici cette profession, sur une population totale de 40 000 résidents sur les quatre iles habitées, population ayant doublé en quinze ans.

Sur le bateau, notre guide, donc, nous attend. Jeune, sympa, sportif, il a tous les atouts pour encadrer les participants à la journée, que nous découvrons : un couple de japonais, un hong-kongais, un allemand, un américain et deux équatoriennes. Et comme équipage, le skipper, sur son siège perché, et un matelot cuisinier.

Nous passons en revue les bateaux de croisières dans la rade. Il y en a près d’une centaine, enregistrés aux Galapagos, du simple voilier à l’hôtel de luxe, puis la vedette se lance dans la traversée vers Santa-Fe.

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Le cuistot lance des lignes, mais les prises se décrochent des hameçons et la seule bonite capturée, trop petite, sera rejetée à la mer. Heureusement, des pièces pêchées la veille nous attendent dans la glacière, elles seront bien vite préparées.

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Au bout d’une demi-heure, le japonais manifeste des signes de malaise, il souffre et semble avoir des difficultés à respirer. Sa compagne ne semble pas très inquiète, ce qui n’est pas le cas de la plus âgée des équatoriennes, infirmière. Le guide décide de rentrer pour l’emmener à l’hôpital. Demi-tour donc, de toute la puissance des 400 CV, et là ça secoue un peu.

Au port, une petite demi-heure d’attente et notre guide revient accompagné, à notre grande surprise, de la japonaise : cela ne devait pas être aussi grave, ou bien elle est particulièrement détachée..

Et c’est reparti, à grande vitesse pour rattraper le temps perdu, vers Santa Fe, où notre première halte sera une plage de rêve, en bordure de mangrove.

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Nous y ferons connaissance de notre premier iguane marin, se chauffant au soleil entouré de crabes rouges.

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Plutôt pataud lorsqu’il se déplace sur les blocs de lave pour brouter des algues, il est capable d’une pointe de vitesse si nécessaire, tricotant alors de ses pattes torses pour s’éloigner de l’importun. Dans l’eau, il devient un nageur exceptionnel, capable de rester immergé jusqu’à 20mn et d’atteindre une dizaine de mètres de profondeur.

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Le déjeuner est confirmé : poisson grillé au barbecue.

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Le temps reste correct : nous sommes à la fin de la saison sèche, la «garua »,  le courant de Humboldt remontant de l’antarctique rafraichit les côtes et maintient la température ambiante autour de 25°. A partir de fin novembre les courants s’inverseront et le courant chaud de Panama viendra accélérer l’évaporation des eaux de mer qui se condenseront sur les reliefs en pluies quotidiennes, dans une atmosphère à plus de 30°. Cette saison des pluies,  verra les « Palos santos », arbres constitutifs de la forêt sèche, enfin verdir, et l’ensemble de la végétation exploser durera jusqu’en avril.

Nous réembarquons pour une côte rocheuse. Distribution de l’équipement de « snorkling » (je hais les anglicismes..), et c’est parti pour une longue séance d’observation de la faune sous- marine, avec masques, tuba et palmes.

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L’eau est fraiche, mais les combinaisons nous protègent, et l’endroit est bien choisi : des bancs de poissons de toutes couleurs, quelques solitaires, et l’éclair brun d’un lion de mer qui file sous nos palmes. Malheureusement mes boitiers d’appareils photos ne sont pas prévus pour cela, et notre première expérience de gopro s’étant révélée infructueuse, il faudra se contenter de ce que l’on voit de la surface, lorsque le cuistot rejette des déchets de poisson

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Retour vers Puerto Aroya, avec quelques coups de soleil, et ça roupille sec à bord…

Au port de pêche, les lions de mer se prélassent, attendant que les pêcheurs aient terminé de trier leur pêche, qui fut bonne.

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Le lendemain, excursion pédestre le matin avec un guide, vers Tortuga bay. Cette très belle plage de sable, où la baignade est interdite en raison des courants était, jusqu’à l’apparition du phénomène « El nino », il y a une trentaine d’année, la zone de prédilection des tortues marines, descendant du Costa Rica, pour leur ponte annuelle.

Le refroidissement des eaux dû à « El  nino » entrainant la mort des coraux, qui étaient à l’origine de la production du sable coquiller, combiné à l’augmentation du niveau de l’océan dû au réchauffement climatique, les petites dunes en bord de plage ont disparu, et les migrations  de tortues ont cessé, ne laissant que quelques individus sédentarisés.

Les iguanes marins, par contre, sont là, et en nombre.

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Les plus petits se confondant avec les blocs de lave, il faut prendre garde à ne pas leur marcher dessus, surtout lorsqu’ils vivent un épisode romantique…

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Sur les rochers bordant la côte, un fou aux pattes bleues, espèce endémique de cette île. Sans que l’on sache pourquoi, sur d’autres îles, les pattes sont rouges…

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L’après- midi, nous retrouverons le même guide, à l’anglais excellent, qui nous fera visiter la station « Darwin ». Il s’agit en fait d’un centre d’étude et de reproduction de tortues terrestres, ayant pour but de sauver des espèces en voie de disparition et de recoloniser les îles.

Les îles Galapagos ont été crées par des éruptions volcaniques successives il y a 7 millions d’années pour la plus ancienne, Santa Cruz, jusqu’à il y a1 million d’années, pour Isabella, la plus récente.

Transportées par les vents et les courants, la flore s’y est progressivement installée, et l’humus développé, couvrant le substrat volcanique à des taux allant jusqu’à 90% de la surface sur les iles les plus anciennes, à seulement 10% pour les plus récentes, qui conservent donc un aspect fort désolé. Quand cela n’a pas été aggravé comme à Baltra, lors de construction d’une base américaine en 1943 qui s’accompagna, jusqu’au départ des 8000 soldats qui l’occupaient en 1947, par la destruction totale de la végétation !

Les premières tortues furent transportées, il y a trois millions d’années, depuis le continent sur des radeaux naturels, troncs ou branchages arrachés de la côte lors de tempêtes, et colonisèrent, à l’abri des agressions d’origine humaine, les diverses iles, où elles développèrent, évolution et isolement aidant, des caractéristiques spécifiques adaptés aux ressources locales. 15 espèces, dont la plupart sont endémiques sur l’une des îles de l’archipel, ont été recensées, que l’on peut regrouper en deux catégories :

Celles ayant des carapaces en forme de dôme, un cou court et rétractile, des pattes courtes, qui se développèrent sur les côtes, à la végétation plus riche et qu’elles pouvaient aisément brouter.

Celles aux carapaces en forme de selle, au long cou non rétractile, aux longues pattes, qui se développèrent sur les pentes des volcans, où elles étaient capables d’atteindre les parties des cactus qui constituaient leur ordinaire. En captivité, les espèces se mélangent sans problème.

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Le règne des tortues fut bouleversé par l’arrivée des premiers navigateurs, corsaires, boucaniers et pirates divers, qui firent de l’archipel à partir du milieu du XVI° siècle, une base de repli, et un garde-manger. Les tortues étant en effet capable de subsister sans boire et sans nourriture pendant plusieurs mois, elles constituaient une réserve de viande sur pieds idéale, que l’on embarquait sur les navires pour les longues traversées.

Et ces joyeux drilles ayant débarqué avec eux chèvres et bovins, qui concurrençaient les tortues dans la recherche de nourriture et écrasaient les nids, chiens et rats qui dévoraient les œufs, et parasites divers, provoquèrent une fonte violente des effectifs.

Elle fut parachevée au XVIII° et au XIX° siècle par l’exploitation industrielle, l’huile de tortue servant à l’éclairage public, à Guayaquil par exemple, et les carapaces à la fabrication d’objets tels que peignes, boites, manches, aujourd’hui moulés en polymères « plastiques »

Deux espèces ont totalement disparu au cours de cette période, où les experts estiment qu’entre deux et trois cent mille tortues ont été exterminées.

Le rôle de la « Station Darwin » est donc de favoriser le repeuplement : le taux de reproduction des œufs n’étant que de 3% en milieu naturel, les œufs sont collectés sur les lieux de ponte, placés en incubateur pendant 4 mois, et les bébés- tortues, dont le taux d’éclosion atteint alors 95%, recensés individuellement, espèce par espèce, avant d’être élevées dans des terrariums jusqu’à l’âge de deux ans. Elles sont alors relâchées dans la région spécifique à leur espèce.

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Intéressant de noter qu’une incubation à 28° produit des mâles, à 29,5° des femelles…

Nous pourrons admirer, dans une enceinte climatisée pour protéger sa « momie », « George le solitaire », grand mâle mort en 2012 et dernier spécimen d’une espèce qui s’est éteinte avec lui. Les efforts de croisement ont été vains, les hybrides étant de toutes façons infertiles, mais sa semence est congelée, un jour, qui sait ?

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Plus chanceuse, l’espèce qui s’était développée sur les pentes du volcan Cerro Azul, dont il ne restait que 18 spécimens et qui furent évacués à dos d’homme avant une éruption volcanique. Sexuellement actifs, ils purent produire en captivité 200 rejetons.

De même, afin de préserver une espèce de l’ile Florida qui ne comptait plus de mâle capable de se reproduire, les gestionnaires de la station purent obtenir du zoo de San Diego, en Californie, le rapatriement d’un mâle, naturellement dénommé Diego, qui put engendrer suffisamment de petits pour sauver l’espèce. On vous le présente ici. Agé d’une centaine d’années, il n’est plus très frétillant..

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Nous visiterons le lendemain, sur Isabella, un centre de même type, abritant 700 tortues et qui, depuis sa création, en a relâché 2200. Mais celui- ci ne vas pas collecter les œufs dans le milieu naturel, ils sont pondus sur place. Et, pour l’anecdote, sachez qu’après la ponte de 4 à 20 œufs au fond d’un trou dans le sable d’une trentaine de cm de profondeur, la femelle le referme, puis urine et défèque dessus afin d’éloigner les prédateurs, puis l’abandonne. Aux petits, 4 mois plus tard, de se débrouiller seuls…

Notre séjour se terminera par une journée sur Isabella, qu’il faut mériter, le trajet de deux heures se faisant dans un bateau rapide, propulsé par 750CV, un tape cul interminable.

Isabelle, belle endormie, aux 5 volcans actifs, aux plages de sable blanc, aux vasières riches en oiseaux divers, à la « Concha Perla », crique propice à la plongée nous accueillera donc, mais je n’aurais pas la chance d’y observer tortues marines, bébés requins et raies mantas supposés fréquenter les lieux, seuls quelques poissons sans attraits daignèrent s’y montrer, insuffisant pour motiver les lions de mer qui, sans vergogne, squattent pontons et  passerelles.

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On pourra cependant y voir, dans le centre de reproduction, notre premier, et dernier, iguane terrestre, bien seul dans son enclos.

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Et un dernier regard sur la forêt de cactus qui ont réussi à s’établir entre les blocs de lave.

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Retour un peu plus pénible par la même vedette, le vent ayant forci. Sur les 25 passagers, un seul sera malade, mais il le sera pour 25…

Le trajet vers Guayaquil se fera sans problème particulier, avec une organisation du voyagiste toujours aussi efficace. Nous aurons eu chaque soir un contact avec l’agent local pour préciser le programme du lendemain, et les guides ou chauffeurs de taxi chargés de nous accompagner ou de nous transporter se seront toujours présentés à l’heure, s’efforçant de nous faciliter le séjour et s’attachant à nous fournir tous les commentaires nécessaires pendant les visites.

Un regret, sans doute dû à l’image que nous avions, et nous ne devons pas être les seuls, d’iles abritant des reptiles dignes de Jurassic park . En fait les iguanes terrestres ne sont visibles que sur certaines îles, et leur taille ne dépasse pas 1,20m. Pour les découvrir, il faut soit séjourner beaucoup plus longtemps, au minimum une dizaine de jours, pour pouvoir se rendre dans les îles qui les abritent, soit, et c’est la solution idéale pour les plongeurs, effectuer une croisière de dix à 15 jours qui permet d’accéder à tous les « spots » intéressants, et de visiter les iles inaccessibles autrement que par mer, mais ce n’est plus du tout le même prix…

Cerise sur le gâteau, de retour à l’hôtel Livingstone, nous constatons que le contenu du compartiment congélateur est dégelé, et que, vu le poisson qu’il contenait, toute la cellule sent le nuoc-mam ! Et pourtant, le véhicule est branché sur le secteur et le chargeur de batterie fonctionne. Quelqu’un aurait il débranché en notre absence ?

Pendant que je me rends à la lavanderia, Agnès se cogne le nettoyage du frigo, dont le compresseur ne fonctionne pas. Et la tension baisse, l’éclairage perd son éclat..

Je ne comprends pas où se situe le problème, jusqu’à ce que je me décide à mesurer la tension du secteur : c’est du 110V.

J’ai vraiment zappé beaucoup de choses dans la préparation de ce 3° séjour. Il nous faudra rouler pour recharger les batteries.

Enfin,, pour reprendre l’argument de Jean François : si on veut éviter les ennuis du voyage, il faut rester chez soi…..

6 commentaires pour “2019-11-27 Galapagos II

  1. Francis et Corinne le 28 novembre 2019 à 10 h 49 min a posté:

    Kikou les aventuriers du bout du monde. Toujours aussi passionnant à lire, on apprend décidément beaucoup de chose grâce à ces descriptions et ces photos magnifiques. Le prochain coup, dit à Agnès de sourire quand elle doit partir en « snorkling », elle ne paraît pas très enchantée (lol comme disent les d’jeuns) !! Très triste, ton histoire sur les tortues et autres espèces, encore un poignant témoignage des ravages de l’espèce humaine sur notre belle terre. Ici, c’est pluies et vents, faites nous encore rêver avec vos aventures. Gros bisous à tous les deux. F&Co

  2. Anne Pradines le 28 novembre 2019 à 11 h 31 min a posté:

    Merci Patrice !
    C’est avec un plaisir sans cesse renouvelé que nous lisons vos récit de voyage: érudition qui devance nos questions, dépaysement assuré, photos magnifiques…
    Nous allons rêver des Galopagos et de l’évolution du vivant.
    Nous pensons bien à vous, bonne poursuite de votre périple. Amicalement.
    Anne M et Gérard

  3. Francois le 28 novembre 2019 à 17 h 07 min a posté:

    En regardant ces superbes photos d’iguane, ça me console de voir qu’on n’est pas responsable de son physique. Quant à Diego, c’est la débandade , mais il a beaucoup de donné : si c’était moi ça serait pire , car déjà sans pinces à vélo ça craint
    Au fait, une tortue quand elle est sur le dos et qu’on lui chatouille le bide , est ce que ça la fait rigoler ?
    Bises
    François

  4. michel et emma le 28 novembre 2019 à 19 h 01 min a posté:

    Passionnante cette excursion aux galapagos!!
    même si vous n’avez pas tout vu , pour nous c’est suffisant pour nous faire rêver!!
    Il est toutefois inquiétant d’apprendre que le nombre d’habitants grandit si vite.
    bises

  5. Christine & Daniel le 2 décembre 2019 à 21 h 04 min a posté:

    Coucou Agnès et Patrice,

    Nous sommes heureux de voir que vous prenez beaucoup de plaisir dans cette belle pause détente aux Galapagos, ça change des impressionnants Kms que vous passez dans votre véhicule.
    On est stupéfaits des tailles XXXL de ces tortues magnifiques, les nôtres paraissent si minuscules à côté d’elles.
    On vous suit toujours avec beaucoup de plaisir
    Bonne continuation pour la suite
    Gros bisous

  6. jeannette et bernard le 4 décembre 2019 à 0 h 30 min a posté:

    quel passionnant cours de SVT ! Nous en avons appris plus sur les tortues en lisant ce récit bien imagé , qu’en cinquante ans de lectures occasionnelles ……Diégo n’est pas terrible mais il a bien rempli sa mission……
    Le fou aux pattes bleues est quant à lui très mignon …plus attirant que les iguanes …
    Merci pour ces belles images et les commentaires dignes d’un reporter de GEO !
    Portez vous bien et continuez à nous faire partager votre passion et vos émotions .
    on vous embrasse

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